Genèse de l'Ennemi.
Je n'ai aucun doute de ce que les appareils d'intelligence nord-américains identifieront les probables auteurs matériels des attentas de New-York et Washington et qu'ils puniront brutalement les supposés auteurs intellectuels ainsi que leurs "protecteurs", profitant de l'occasion pour obtenir quelques bénéfices géostratégiques, secondaires ou pas. Toutefois, je n'ai pas le moindre doute que ceux-ci ne seront pas les véritables responsables... étant donné que les vrais responsables se sont... eux même.
Comment est-il possible qu'un Etat planifie et mette en oeuvre froidement l'assassinat de plusieurs milliers de ses propres citoyens?. Quand il s'agit d'une décision concernant les fondements même d'un système de pouvoir, celui-ci est, sans le moindre doute, capable de cela... et de beaucoup plus. En fait la question n'est pas de savoir comment (celle-ci a été répondue ce 11 septembre) mais pourquoi.
Au sein des supposées démocraties occidentales, l'adhésion des individus à la collectivité n'est pas vécue comme une intégration volontaire de ceux-ci à une communauté percue comme "préeminente" à chacun de ses membres, mais comme une intégration passivement acceptée et même souvent contestée. De ce fait il est extrêmement difficile pour l'appareil politique du Pouvoir de "légitimer" la nécessité de sa propre existence.
De là, face à cette absenced'un soutient actif (pour), l'impérieuse nécessité de la recherche d'un soutient réactif (contre) et, donc, l'indispensable besoin d'un ennemi. Ennemi qui non seulement légitimera l'existence de l'Etat en tant que tel, sinon qi'il favorisera la cohésion et le control des membres de la communauté, lesquels seront disposés à céder une partie de leurs autonomie et libertés individuelles, acceptant la "militarisation" de la vie quotidienne comme une partie du prix à payer pour mener le combat contre l'ennemi de tous et de chacun d'entre eux en particulier.
Il est à noter que cela n'est pas seulement vrai au niveau d'un Etat-nation donné (par exemple les Etats-Unis) vis à vis de "ses citoyens", mais aussi à l'échelon de la structure de domination économiquement et politiquement prépondérante vis à vis de l'ensemble des individus vivant en son sein. D'autant plus que le control du "tout" sur chacun de ses "membres" est beaucoup plus aléatoire et moins efficace, étant donné que les structures politico-juridiques du "tout" son encore largement étatiques (quant à leur origine et champs d'application) quand les "membres" tendent, eux, essentiellement de part leur mobilité, à échapper chaque jour d'avantage à sa sphère d'influence.
Quand un Etat répète sans cesse "à ces citoyens" que sa principale et presque unique raison d'être réside en leur protection (sécuritaire et non économique), il en résulte primordial et indispensable pour lui d'identifier cet ennemi duquel il est censé les protéger. Depuis la niut des temps cet ennemi a toujours été "l'autre", la tribu, le clan, la race, la Nation. Avec la disparition de l'URSS, et avec elle la menac du communisme (en tant que système politico-économique et idéologique), le Gran Ennemi, le seul capable de mettre réellement en danger la survie de la "civilisation capitaliste judéo-chrétienne), s'est envolé.
Momentanément celui-ci a été substitué par "la guerre contre le trafic des drogues", toutefois, révélant de part son action même trop de contradictions propres au système et perdant en conséquence trés rapidement sa crédibilité, celui-ci a cessé d'être fonctionnel.
En ces temps de globalisation, qui nie de fait la raison d'être des Etats-nation, choisir ou désigner l'un de ceux-ci comme Ennemi, serai également contradictoire et peu fonctionnel (sauf évidemment si son éventuelle élimination ou soumission répond à certains intérêts géostratégiques de la puissance dominante).
L'Ennemi du "système" et la "civilisation", qui s'incarnent tous deux dans la puissance économiquement et militairement dominante, doit être lui aussi global et s'incarner en une structure supra nationale et supra étatique. Quel meilleur Ennemi pour un système dont le véritable Pouvoir est invisible et insaisisable que le terrorisme aveugle et sans visage !. Pour être facilement reconnu et assumé comme tel, le MAL, en son "apparence", doit être l'opposé du BIEN, mais en son "essence" il se doit d'en être son image inversée.
Ayant trouvé le meilleur concept possible d'Ennemi, il reste à lui donner vie. Faire de ce concept abstarit une menace réelle, la plus sanglante, maligne et répulsive possible. Une menace mortelle, non pas seulement pour la structure du Pouvoir et sa "représentation politique", mais pour chacun des membres de la communauté en tant qu'individus... qui à n'importe quel endroit et à n'importe quel moment... peuvent devenir... ses innocentes victimes.
Ce 11 septembre la représentation politique la plus puissante du "Pouvoir global", incarnation du BIEN, a enfanter son mortel ennemi, le Terrorisme, incarnation du MAL.
Traduction du texte antérieur, rédigé le lendemain de "l'attaque terroriste" du 11 septembre 2001, pour être publié dans la section forum de la page web du Nouvel Observateur et du Monde.
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